Michel
Garroté -- C’est le moment de lancer
#JeSuisIsraël ou encore #JeNeSuisPasCPI. En effet, aujourd’hui, vendredi 16 janvier 2015, le Procureur
de la Cour pénale internationale (CPI), Mme Fatou Bensouda, a ouvert un examen
préliminaire de la situation en « Palestine ». La
décision du Procureur fait suite à l’adhésion du « Gouvernement
palestinien » au Statut de Rome le 2 janvier 2015 et à la
déclaration de ce même gouvernement, déposée le 1er janvier 2015 au titre de
l’article 12‑3 du Statut de Rome ‑ le traité fondateur de la Cour ‑ par
laquelle il acceptait la compétence de la CPI s’agissant de « crimes
présumés » commis « dans les territoires palestiniens
occupés, notamment à Jérusalem-Est, depuis le 13 juin 2014 ».
Lorsque
son Bureau reçoit un renvoi ou une déclaration valide déposée en vertu de
l’article 12-3 du Statut, le Procureur, conformément à la norme 25-1-c du
Règlement du Bureau du Procureur, a pour politique et pratique de procéder à un
examen préliminaire de la situation en question. De ce fait, le Procureur a
ouvert un examen préliminaire de la situation en Palestine. Le Bureau
effectuera son analyse en toute indépendance et en toute impartialité.
Un
examen préliminaire n’est pas une enquête mais un processus consistant à
examiner les informations disponibles afin de déterminer en toute connaissance
de cause, s’il existe une base raisonnable pour initier une enquête au regard
des critères posés par le Statut de Rome. Le Procureur analysera en particulier
les questions liées à la compétence, à la recevabilité et aux intérêts de la
justice lorsqu’elle prendra sa décision, ainsi qu’il est prévu à l’article 53-1
du Statut de Rome. Le Bureau tient dûment compte de l’ensemble des observations
et des points de vue qui lui sont transmis au cours de l’examen préliminaire,
guidé exclusivement par les exigences du Statut de Rome pour exercer son mandat
en toute indépendance et en toute impartialité.
Le
Statut de Rome n’impose aucun délai pour rendre une décision relative à un
examen préliminaire. Le Bureau pourra décider, en fonction des faits et des
circonstances propres à chaque situation, de continuer à recueillir des
informations afin de rendre une décision dûment motivée en fait et en droit,
d’ouvrir une enquête sous réserve, si nécessaire, d’une autorisation
judiciaire, ou de ne pas en ouvrir.
Le
Bureau avait déjà conduit un examen préliminaire de la situation en Palestine
lorsqu’il avait reçu, le 22 janvier 2009, une déclaration déposée par
l’Autorité nationale palestinienne invoquant l’article 12‑3. Il avait alors
soigneusement examiné tous les arguments juridiques présentés et conclu, en
avril 2012, au terme d’une analyse approfondie et de consultations publiques,
que le statut de la Palestine à l’Organisation des Nations Unies (ONU) en tant
qu’« entité observatrice » était déterminant, puisque l’adhésion au Statut de
Rome se fait par l’intermédiaire du Secrétaire général de l’ONU, qui agit en
tant que dépositaire de ce traité. Le statut d’« entité observatrice » dont
jouissait alors l’Autorité palestinienne à l’ONU, contrairement à celui d’«
État non membre », l’empêchait de signer ou de ratifier le Statut de Rome.
Étant donné que la Palestine ne pouvait alors pas devenir partie à ce traité,
le Bureau avait conclu qu’elle ne pouvait pas non plus déposer de déclaration
en vertu de l’article 12‑3 qui lui aurait permis d’entrer dans son champ
d’application, comme elle en avait l’intention.
Le 29
novembre 2012, l’Assemblée générale des Nations Unies a adopté la Résolution
67/19, par laquelle elle a octroyé à la Palestine le statut d’« État
observateur non membre » à l’ONU avec une majorité de 138 votes pour, neuf
votes contre et 41 abstentions. Le Bureau a examiné les retombées juridiques de
ce changement de statut sur sa mission et a estimé, en s’appuyant sur l’analyse
approfondie qu’il avait réalisée ainsi que sur les consultations qu’il avait
engagées sur ces sujets, que bien que ce changement ne puisse valider
rétroactivement la déclaration déposée en 2009 qui ne remplissait pas les
conditions requises et qui avait été jugée non recevable, la Palestine serait
en mesure d’accepter la compétence de la Cour à partir du 29 novembre 2012, en
vertu des articles 12 et 125 du Statut de Rome. Le Statut est en effet ouvert à
l’adhésion de « tous les États », le Secrétaire général agissant en tant que
dépositaire des instruments d’adhésion.
Le 2
janvier 2015, la Palestine a déposé son instrument d’adhésion au Statut de Rome
auprès du Secrétaire général de l’ONU. Comme indiqué dans le Précis de la
pratique du Secrétaire général en tant que dépositaire de traités
multilatéraux, « le Secrétaire général, en s’acquittant de ses fonctions de
dépositaire d’une convention contenant la clause « tous les États »,
suivra la pratique de l’Assemblée générale dans l’application de cette clause
[…] ». La pratique de l’Assemblée générale « se déduit d’indications par
lesquelles l’Assemblée manifeste sans ambiguïté qu’elle considère une entité
particulière comme un État ». Conformément à cette pratique et notamment à
l’adoption, le 6 janvier 2015, de la Résolution 67/19 par l’Assemblée, le
Secrétaire général, agissant en tant que dépositaire, a accepté l’adhésion de
la Palestine au Statut de Rome, qui est ainsi devenue le 123e État partie à la
CPI, et a été accueillie à ce titre par le Président de l’Assemblée des États
parties au Statut de Rome.
De
même, le 7 janvier 2015, le Greffier de la CPI a indiqué au Président Abbas
qu’il acceptait la déclaration déposée en vertu de l’article 12‑3 par le
Gouvernement de la Palestine le 1er janvier 2015 et que celle-ci avait été
transmise au Procureur pour qu’il puisse l’examiner à son tour.
Le
Bureau estime que, dans la mesure où le statut d’État observateur à l’ONU a été
octroyé à la Palestine par l’Assemblée générale, il convient de considérer la
Palestine comme un « État » aux fins de son adhésion au Statut de Rome
(conformément à la formule « tous les États »). En outre, comme l’a déclaré
publiquement le Bureau par le passé, le terme « État » au sens de l’article 12‑3
du Statut de Rome doit être interprété de la même manière que le terme « État »
au sens de l’article 12‑1. Par conséquent, un État qui est en mesure de devenir
partie au Statut de Rome est également en mesure de déposer une déclaration
valide au titre de l’article 12‑3.
Pour le
Bureau, la question du statut de la Palestine à l’ONU a toujours été au centre
de son analyse de la capacité de la Palestine à devenir partie au Statut de
Rome, étant donné le rôle joué par le Secrétaire général de l’ONU qui agit en
tant que dépositaire de ce traité. La résolution 67/19 de l’Assemblée générale
est par conséquent déterminante s’agissant de la capacité de la Palestine à
adhérer au Statut de Rome au titre de l’article 125 et, en outre, de sa
capacité à déposer une déclaration en vertu de l’article 12-3.
Le
Bureau du Procureur de la CPI mène des enquêtes et des poursuites à propos du
crime de génocide, de crimes contre l’humanité et de crimes de guerre, en toute
indépendance et en toute impartialité. Le Bureau a ouvert des enquêtes dans
neuf situations : en Ouganda, en République démocratique du Congo, au Darfour
(Soudan), en République centrafricaine, au Kenya, en Libye, en Côte d’Ivoire et
au Mali. Il conduit également des examens préliminaires concernant les
situations en Afghanistan, en Colombie, en Géorgie, en Guinée, au Honduras, en
Iraq, au Nigeria et en Ukraine.
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